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dépouillé

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Une actualité de David V.
Publié le 19/03/2016

Que le bandeau citant Molière n'aille pas vous égarer : impossible de seulement sourire à la lecture du dernier livre du bordelais Marc Pautrel qui revient demain avec un deuxième opus dans la collection L'Infini de Phlippe Sollers, grand connaisseur en choses de l'amour qui a dû trouver la citation : "L'amour risque des choses extraordinaires". Un voyage humain court sur soixante-dix pages qui sont une leçon d'économie narrative, et tant pis pour ceux qui y verront de la pauvreté romanesque. Rongée jusqu'à l'os la phrase de l'auteur s'interdit le moindre gras, le moindre débordement, le moindre sursaut de lyrisme, on en ferait des dictées si l'on ne craignait d'effrayer nos écoliers avec ce récit, qui se dit "roman", d'un moment d'enfer et de bonheur, celui d'un couple qui veut tout donner à son amour, y compris la vie, et se brise sur le réel, le temps passé et l'attente. Aucune trace de cynisme, aucune référence littéraire (ou très cachée), aucun développement psychologique mais la nudité d'une histoire où un destin semble se jouer en cinquante mots. Un voyage humain serait presque un anti-voyage : c'est plutôt de salle d'attente qu'on voudrait parler, comme si le voyage attendait de commencer, créant une tension qui ne se relâche pas et qui nous empêche de croire au bonheur évoqué quand il est supposé être là, sous nos yeux. Raconter une grossesse est d'une ingratitude complète, une naissance une gageure totale. Pourtant Pautrel tient sa ligne tendue au-dessus du vide et avance, dans un refus de séduire qui confine à la sainteté. On sait depuis longtemps que pour être écrivain il faut tout renier. N'est-ce pas ce qu'a tenté dans ce livre dur comme une pierre cet auteur qui a choisi de violenter, avec calme, son lecteur : le livre existe sans lui, et c'est d'un courage ou d'une folie sans nom.

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