Quelles seront les tendances de l'automne ? Si j'étais blogueuse dans un journal de mode, je vous parlerais dominantes de couleurs, longueurs de jupes, formes de manteaux et que sais-je encore. Mais comme je suis libraire, les tendances qui m'intéressent sont celles qui se dessinent déjà sur les tables. Bien sûr la rentrée sera sous le signe du fantastique et de la romance avec quelques auteurs très attendus comme Carina Rozenfeld qui enflamme déjà la blogosphère, sous le signe de l'humour aussi avec l'indispensable Comment devenir une rock star ou pas d'Anne Percin mais aussi de façon plus inattendue, sous le signe de la science et de l'infiniment petit. Trois auteurs abordent en effet à leur façon le thème des nanotechnologies : Michael Grant dans l'énigmatique BZRK (à paraître le 20 septembre), Emanuel Dadoun (dans Microphobie , thriller biologique dont il sera question ici très bientôt) et Florence Hinckel dans Théa pour l'éternité publié dans l'excellente collection Soon chez Syros.
Coïncidence ou signe des temps ? La science et les questions éthiques et philosophiques qu'elle ne cesse de déployer sont plus que jamais au coeur de nos sociétés. Quoi de mieux que l'anticipation pour poser des questions essentielles quant à l'utilisation de ces prouesses technologiques qui rapprochent l'homme du surhomme, et qui font miroiter des promesses de jeunesse éternelle ? L'héroïne de Théa pour l'éternité a 16 ans lorsqu'elle est sollicitée pour participer avec 29 autres volontaires à un programme scientifique audacieux et tenu secret. L'enjeu est simple : si le protocole médical fonctionne, Théa pourrait à tout jamais garder la fraîcheur de ses 16 ans, arrêter le temps et devenir l'une des premières humaines à défier la mort. Enthousiasmée par cette avancée scientifique prodigieuse, grisée par l'idée que la vie s'étire désormais devant elle, Théa se sent porteuse d'une énergie inépuisable. Mais Théa est-elle aussi invincible qu'elle voudrait le croire ? Sait-elle tout de ce programme et de ces conséquences ? Et si elle avait agi à la légère et ne pouvait plus reculer ?
Théa pour l'éternité fait bien sûr penser à l'inoubliable Des fleurs pour Algernon et Florence Hinckel rend d'ailleurs un hommage appuyé à ce désormais classique de l'anticipation dans son roman. Les questions autour de l'éthique et des dérives de la science sont finement abordées et font écho à cette quête troublante de l'éternelle jeunesse qui se pose comme un véritable problème de société aujourd'hui. S'inspirant de technologies qui sont déjà à l'oeuvre dans la médecine, Florence Hinckel signe là un roman glaçant mais au discours humaniste, amenant son lecteur à se questionner sur cet éternel désir d'accéder à l'immortalité.
Ne vous méprenez pas toutefois sur mon propos, si Théa pour l'éternité fait parfois froid dans le dos parce qu'il parle de nos sociétés et de leurs dérives, c'est avant tout un roman tourné vers la vitalité, et une superbe histoire d'amour. Mais chut, même sous la torture, je ne vous dirais pas que j'en ai eu les larmes aux yeux à la fin !