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Le sel de la vie

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Publié le 09/11/2017
Ce billet d'humeur a été rédigé par Elisa Dupont, étudiante en B.T.S. d’Assistante de Manager au lycée Condorcet de Bordeaux
Le sel de la vie est un essai de Françoise Héritier qui est une anthropologue, une ethnologue et une féministe engagée. Françoise Héritier retrace à travers cet essai tous les moments marquants et émouvants qui ont provoqué en elle des sentiments forts. Ainsi, elle nous invite à partager des bouts de sa vie, banals pour la plupart, voire insignifiants à première vue pour certains et pourtant tous essentiels car ce sont eux qui donnent de la saveur à l’existence, qui la pimentent et lui ôtent sa fadeur, semblables à ces petits grains de sel que l’on ajoute à un plat pour en relever le goût.
Le destinataire premier de son écrit est un de ses amis, médecin, M. Piette, qui lui a envoyé une carte postale en s’excusant presque d’avoir « volé » quelques jours de vacances. Tout le propos de l’écrivaine va viser à lui faire prendre conscience qu’il est non seulement légitime mais aussi essentiel qu’il s’accorde un peu de répit afin de profiter de la vie et de tout ce qu’il manque à force de travailler sans arrêt. Elle écrit 16 listes, dans lesquelles elle énumère des souvenirs, des moments vécus, des moments oubliés.
J’ai adoré ce livre mais je dois avouer qu’il m’a dérangée car il m’a amené à réaliser une introspection critique. Je me suis remise en question, et j’ai compris que je ne vivais pas pleinement car j’avais tendance à négliger finalement ce qui me semble dérisoire et qui est en réalité essentiel dans ma vie. Il m’a rappelé à quel point aujourd’hui, on ne fait plus attention à ces petites choses, non pas parce qu’on travaille trop comme M. Piette, mais parce qu’on est scotché à nos téléphones, parce qu’on est dans l’utilitaire ou que l’on se projette dans nos envies futures au lieu de vivre pleinement l’instant présent. On n’apprécie pas assez ce qui nous entoure, on néglige les sensations, les odeurs dans la rue, la vue du ciel le soir… On privilégie l’image sociale au détriment du vécu.
Toutes ces petites choses, on les partage sur les réseaux sociaux. Je pars en vacances? Je poste une photo sur Instagram. Je passe la journée au parc ? Je poste une photo sur Snapchat. Je mange dans un resto hors de prix ? Je poste une photo sur Facebook. Et après ? Que vivons-nous vraiment, pleinement sans filtre narcissique, sans projection de l’effet produit sur autrui. Quelle attention portons-nous à cette part intime, propre à chacun, unique, qui nous définit et que l’on peut appréhender chez autrui seulement en prenant le temps de le rencontrer et de le connaitre ? On a tendance à négliger l’essentiel, on ne sait plus se réjouir de l’instant présent, on est avide de ce que l’on ne possède pas sans percevoir la richesse de ce que l’on a. Demain nous apparait riche de promesses ce qui nous amène à dévaloriser aujourd’hui.
Après avoir culpabilisé, j’ai fait ma propre liste du sel de ma vie, et c’est ce qui m’a fait adorer ce livre. J’ai ouvert les yeux, écouté ce qui m’entourait, mangé plus lentement, essayé de respirer l’instant présent, de m’encrer dans celui-ci et d’apprécier ce que j’avais. J’en ai conclu qu’il fallait simplement que je lève le nez et que tout était à ma portée.
Le sel de ma vie
Recevoir le message d’une personne qu’on aime, apprendre qu’il y a des frites à la cantine, entendre la sonnerie à 17h le vendredi soir, regarder le coucher du soleil, se balader en vélo le soir en été, aller au cinéma, faire tomber le popcorn par terre, se retenir de rire, voir l’arrivée de la saison des fruits rouges, se baigner pour la première fois de l’année, jouer avec le chat et lui faire des câlins, l’entendre ronronner, jouer au ballon, entendre ma sœur rire aux éclats, dessiner, peindre, chanter, coller, planifier un voyage, réserver des places de concert, crier après une longue journée, fermer les yeux dans le parc et écouter les arbres, manger avec les doigts, manger avec les colocs, s’acheter de nouveaux vêtements, faire du lèche-vitrine, imaginer ce qu’on sera dans 1 an, 10 ans, 20 ans, pleurer après avoir été stressée, voir les gens qu’on aime réunis, attendre la période de Noël, regarder dans le vide en sachant qu’on regarde dans le vide, rentrer le weekend chez papa et maman, prendre des nouvelles de mamie, passer la journée à Ikea, prendre un parfum de glace différent à chaque fois, sentir sa narine se déboucher, apprendre les paroles d’une chanson et la chanter à tue-tête, faire semblant de détester Jean-Jacques Goldman pour embêter maman, prendre la route le dimanche soir, dormir 10 heures, prendre une douche glacée en plein été, regarder le soleil se lever à travers les traits du volet, porter mon pull-chenille, rire de ma dernière ivresse,…
Françoise Héritier m’a permis d’être plus naïve et de comprendre que TOUT est important.

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