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Bernanos astral

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Une actualité de David V.
Publié le 09/05/2013
Georges BernanosL'occasion va nous être donnée ce mois-ci de parler non pas d'un Bernanos mais de deux, le premier, Georges, celui que tout le monde connaît ou devrait connaître fait l'actualité car le Castor Astral, vénérable maison bordelaise de haute qualité (nous parlions plus tôt sur ce même blog du dernier livre de Georges Kolebka, auteur astral mais d'une autre galaxie) se lance dans la réédition de son œuvre romanesque, le second, Michel, son fils, parce que ressort enfin aux bons soins de l'excellente collection La Petite Vermillon de La Table Ronde son chef d'œuvre La Montagne morte de la vie (sortie le 29 mai). Deux Bernanos, deux écrivains très différents pour un patronyme impressionnant. Mais concentrons-nous pour l'heure sur le premier. Sans vouloir tomber trop dans l'anecdotique, on peut légitimement s'étonner qu'un auteur d'une telle importance, en Pléiade depuis de nombreuses années, se voit réédité chez un éditeur méconnu (injustement d'ailleurs) du grand public, même celui dit "cultivé". Ainsi Plon ne serait plus l'éditeur de Georges Bernanos... Indiscrets, nous avons interrogé l'un des responsables du Castor, Marc Torralba, qui ne fait pas mystère que ce sont les héritiers eux-mêmes emmenés par Gilles le petit-fils, par l'intermédiaire de leur avocat (dont la femme est libraire à Paris, elle avait sans doute repéré l'excellent travail de redécouverte sur Bove notamment et la qualité de la collection Les Inattendus voire peut-être aussi la présence du fils Michel que nous évoquions : La Forêt complice) qui les ont contactés, convaincus que désormais on a plus de chance d'être défendu par un petit que par un gros.
Les deux premiers livres qui nous parviennent sont à la hauteur des grands espérances des bernanossiens : qualité de l'objet (rabats, maquette originale) ; qualité des préfaces inédites : pour Les Grands cimetières sous la lune Michel del Castillo, pour Sous le soleil de Satan Sébastien Lapaque dont on se souvient de l'excellent ouvrage (Georges Bernanos encore une fois, coll. Babel). Le premier, qui date de 1938, est son célèbre pamphlet anti-franquiste rédigé dans la colère à l'annonce des horreurs commises par les troupes du futur Caudillo et d'autant plus marquant qu'il émane d'un catholique farouche, plutôt monarchiste mais écœuré par la bourgeoisie triomphante : une leçon de style et de droiture que devraient méditer nos pamphlétaires contemporains aux petits pieds. Le second, connu d'un grand nombre de lecteurs à la suite du succès controversé du film de Maurice Pialat (souvenez-vous du fameux "je ne vous aime pas non plus" du réalisateur face aux imbéciles sifflets) dont on retrouve en bandeau les personnages (Depardieu sur Bernanos, cela fait toujours étrange, mais en soutane…), est le tout premier roman du grand écrivain, un livre qu'on lui annonçait voué à un échec certain tant son thème (la rédemption et la lutte du bien et du mal) passait pour austère et qui fit un triomphe (100 000 exemplaires) : imagine-t-on aujourd'hui un tel élan sur un tel sujet ? Nous n'oserons pas nous lancer même dans un semblant d'analyse de ces chefs- d'œuvre, leurs préfaces remplissant parfaitement cet office. Insistons seulement sur ce mystère qui veut qu'un auteur de cette dimension ait paru trop peu rentable à son éditeur historique pour qu'il ne lui consacre plus qu'une faible énergie (l'Omnibus a vite disparu du fonds). Dans un article du Monde, Alain Beuve-Méry rappelle que Georges Bernanos lui-même avait quelques doutes sur son éditeur, mais n'est-ce pas oublier qu'il n'est pas un auteur qui n'est à se plaindre de celui à qui il confie son travail ? Il rappelle aussi que le domaine public se rapproche (dans dix ans) et qu'il n'est que temps de mettre au point et sans anarchie une édition de qualité. Ne rêvons pas, les tirages n'atteindront pas des sommets, mais quel joie (un mot bernanossien entre tous) de pouvoir offrir à nouveau ces titres indispensables. Et préparez-vous aux superlatifs quand Monsieur Ouine viendra pointer son regard (peut-être d'ici la fin de l'année, nous dit l'éditeur) car nous tenons ce livre pour un chef-d'œuvre ABSOLU.

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