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Bibliothèque nocturne

2006_bibliotheque-nocturne
Une actualité de David V.
Publié le 21/09/2013

Thierry LagetThierry Laget fait partie de ces auteurs que l'on voudrait conseiller à ses amis les plus chers, en espérant qu'ils tireront profit de l'intelligence de son propos, du raffinement de sa prose et de la beauté des livres qu'avec élégance il nous offre. S'il est romancier, notamment dans la blanche de Gallimard, avec des histoires qui ne manquent pas d'ironie et de mordant, il se fait asussi chroniqueur d'un temps retrouvé ou de mondes perdus, d'instants ressuscités et de rêves de mots. JB Pontalis l'accueille pour la cinquième fois dans sa belle collection L'Un et l'autre et il semble que ce soit l'auteur idéal pour ce merveilleux endroit où se retrouvent des écrivains en tête à tête avec leurs démons les plus familiers. Avec Bibliothèques de nuit il nous convie à quelques épiphanies, face à un paysage de Dalécarlie ("le décor de l'une des vies que nous n'avons pas eues"), une obscure rue d'Auvergne où un morceau d'enfance a laissé son empreinte, un parc de la région parisienne où le fantôme de celui qu'il fut revient hanter des allées centenaires pour "observer le monde s'écouler en lui", devant une vieille boîte de chocolats où s'étale le mystère d'une peinture de grand maître, au coeur de la bibliothèque de l'Assemblée Nationale pour une traversée nocturne et solitaire parmi vrais et faux livres. Le travail du souvenir qui était à l'oeuvre dans le superbe A des dieux inconnus (en 2003 toujours chez L'un et l'autre) retrouve ici sa pleine mesure : Laget creuse l'espace qui l'entoure pour y trouver des traces du temps, il déchiffre le réel en lui inventant un sens, convoque souvenirs et lectures et, sans jamais cesser d'être personnel, nous ouvre les portes  du regard. On conseillera à tous ceux qui désespèrent devant la pauvreté de style de nos écrivains (pour qui le minimalisme scolaire, pas trop difficile, tient lieu de credo) d'écouter la voix de Thierry Laget, complexe et limpide, jamais artificieuse. Proustien, c'est certain, stendhalien, on le sait, Laget n'en est pas moins un auteur de son siècle, mais sans renier l'héritage d'un classicisme qui permet d'ordonner la pensée, de lui donner corps et esprit. Ecrivain d'un voyage quasi immobile, il est de ceux qui aident à traverser les nuits, et ce n'est pas si fréquent.

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