Un livre, un film
Avant de devenir un film - actuellement au cinéma, courez le voir ! - Boy A est un roman de Jonathan Trigell intitulé Jeux d'enfants qui ressort dans la collection de poche Folio policier. Paru en 2004, il avait reçu le prix Waverton Good Read Award récompensant en Grande-Bretagne le meilleur premier roman de l'année. Ce n'est pas à proprement parler un roman policier mais plutôt un roman noir et social avec, en toile de fond, la prison et les inévitables difficultés de réinsertion. On suit ainsi le parcours de Jack, âgé de 24 ans, qui vient juste d'être libéré. Jack n'est d'ailleurs pas son vrai prénom - ayant purgé sa peine, il a eu droit de choisir sa nouvelle identité - exit l'anonyme Boy A, "le jeune A, ainsi baptisé par le tribunal pour pouvoir le distinguer d'un autre gosse B", "... son vrai prénom, aujourd'hui, gît telle une mue de serpent à l'intérieur d'un dossier au fond d'un placard dans un bureau dallé de vinyle..." Condamné pour un crime qu'il a commis quand il était enfant, il a passé toute son adolescence enfermé. Il est d'autant plus touchant et maladroit quand il sort, découvre l'extérieur, les rues, les gens, la ville, la vie, le mouvement - on voit avec ses yeux, sa perception : "Il se rend compte que "le vaste monde" n'est pas seulement une expression. Les rues sont larges, les maisons hautes, les horizons extraordinairement dégagés ; même les petites épiceries de quartier sont spacieuses. Il y a partout de profondes cavernes pleines de disques et de vidéos, de clopes et de bière. De près, les arbres semblent plus verts, les murs plus rouges, les fenêtres plus transparentes". A l'écran, Andrew Garfield, le jeune acteur qui incarne Jack est magnifique, tout en sensibilité et en retenue. C'est qu'il a tout à apprendre : du comportement le plus anodin aux émotions et aux sentiments, des premiers émois amoureux en passant par l'amitié, le travail etc, jusqu'au jour où... On n'en dira pas plus, juste qu'un grain de sable peut muer l'espoir en déception, et le passé vous rattraper inéluctablement. Ce qui, juste-là, semblait un roman ou un film de rédemption tourne alors à l'implacable - la fatalité explose cruellement, à vous arracher des larmes à la dernière page du livre ou à la dernière image du film.