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Coudray le truqueur

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Une actualité de David V.
Publié le 24/08/2013

Jean-Luc CoudrayLe problème avec les aphorismes c'est que, lorsqu'ils sont réussis, on est tenté de les citer à la file au risque certain d'en noyer l'intérêt sous le déluge. L'intelligence qu'ils manifestent nous donnant l'impression d'être contagieuse, on croit se l'approprier quand on ne joue qu'à l'écho. On n'échappe pas à cet écueil avec le dernier livre de l'inénarrable Jean-Luc Coudray paru à L'Anabase où il étale sans vergogne ses Pensées truquées comme des perles découvertes au creux des huîtres de son bassin intellectuel. Ses obsessions qui parcourent toute son oeuvre narrative (car ce n'est pas vraiment un romancier, la fiction ne l'intéresse guère) se font ici plus visibles, plus directes, bref plus évidentes : elles concernent les femmes, ces ennemies fascinantes, la science, cet univers sans certitude, l'imbécilité, ce monde sans fin, la politique, cet infini sujet d'indignation et de moquerie, la création tout entière en somme qui reste pour Coudray un objet d'étude et de contemplation intelligente qui lui permet d'aiguiser son art du paradoxe, un art dangereux car à trop le manier il peut vous exploser à la figure. Pour l'heure, ni trop aigü, nitroglycérine, les Pensées truquées nous invitent à profiter de la brièveté, moments de suspension dans un monde condamné à la rapidité. Coudray fait du bien aux neurones qui nous restent, ses colères se font flèches ou plutôt fléchettes, comme tirées d'une sarbacanne. Et pour nous en faire l'écho différemment et jouer au perroquet, en voici un petit florilège.

Les hippopotames découvriront la pornographie le jour où on leur montrera des photos d'hippopotames.

La volonté des morts est sacrée parce qu'ils ne peuvent se défendre. La volonté du chef est sacrée parce qu'il peut se défendre.

La femme a deux seins pour nous obliger à choisir, donc à désirer.

Mourir pour la patrie demande des qualités que la patrie assassine.

La France est envahie chaque année par 60 millions de touristes. Et si, un jour, ils s'organisaient ?

Si ma femme me trompe avec un imbécile, c'est qu'elle a besoin d'un peu d'ombre.

Si les avions n'avaient pas de roues, ils ne pourraient pas voler.

Si le président de la République parle d'égal à égal avec quelqu'un ce sera forcément un étranger.

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