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De l'amoralité

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Une actualité de Fleur Cattiaux
Publié le 09/05/2013

Howard McCordNous vous l'avions annoncé cet été (cf. notre blog du 25 juillet), et nous n'avons pas été déçu par son arrivée dans nos rayons. Le petit dernier des Editions Gallmeister est un régal ! A cheval entre la Collection nature writing et la Collection noire, ce court roman au titre ambigu est signé de la main du poète, essayiste et désormais romancier Howard McCord.

Le narrateur de L'homme qui marchait sur la lune  nous raconte par le menu le récit de son ascension d'une montagne aussi perdue qu'hostile du Nevada, que l'on surnomme de façon plutôt évocatrice "La lune". C'est dire si elle a peu de chances de servir de lieu de pérégrination touristique ! Mais on s'en rend compte assez rapidement, William Gasper1 est loin de donner dans le dilettantisme en matière de randonnée, de même qu'il se révèlera par la suite maître dans un art assez particulier. Ce personnage solitaire, marginal et profondément noir qui déclare lui-même regretter de ne pas être un "homme paisible" dévoile peu à peu sa face sombre au lecteur. Celui-ci a dès lors tout le loisir de prendre la mesure de ce qui peut passer par la tête d'un homme qui "refuse de [s']encombrer de la morale ou de tout autre fantôme" et pour qui la conscience n'est rien de plus qu'un "lubrifiant social"...

Notre homme, qui connaît déjà son environnement comme sa poche, va rapidement suspecter qu'il n'est pas seul. S'engage alors une sorte de course-poursuite entre notre narrateur et cette présence étrangère qui prend le visage d'un duo de figures célèbres de la mythologie écossaise - Cerridwen2  et le chat Palug3.

S'il y a bien une chose dont on ne peut douter, c'est que Howard McCord maîtrise bien son sujet. Autofictionnel à plus d'un titre, ce roman met effectivement en scène un personnage qui, comme son auteur, est né en 1932, et a été profondément marqué par la guerre de Corée. Qui plus est, McCord est lui-même un adepte de la randonnée en montagne, activité qui lui permet d'explorer des lieux isolés et difficilement accessibles aux hommes inexpérimentés. Quant à son écriture, elle n'est certes pas dénuée d'intérêt : l'auteur possède un talent certain pour faire monter le suspense et tenir le lecteur en haleine. Une atmosphère des plus étranges caractérise ce puissant roman psychologique dont il convient également de souligner la redoutable efficacité. Enfin, il s'agit d'un véritable tour de force dans la mesure où il rend hommage à l'ambiguïté caractéristique du genre humain, comme en témoigne un revirement de situation des plus déroutants !4

 


 1 En anglais,  to gasp for breath/air signifie littéralement haleter, un nom qui n'a manifestement pas été choisi au hasard !

2 Déesse de l'initiation et de la transformation (selon la mythologie médiévale, elle possédait la faculté de se métamorphoser aussi souvent qu'elle le souhaitait).

3 Le chat Palug, quant à lui, était un chat monstrueux à qui l'on imputait la mort de plusieurs dizaines de soldats.

4 L'homme qui marchait sur la lune a d'ailleurs remporté à sa sortie aux Etats-Unis en 1999 un petit prix décerné au niveau de l'Etat d'Ohio, à savoir le Prix Nancy Dasher de la Littérature.

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