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Honorer la fureur de vivre de James Agee.

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Rodolphe Barry signe un roman biographique remarquable et brûlant sur un auteur sans concession.
Une actualité de Anaïs
Publié le 11/03/2019
Connu pour son travail dans le sud des États-Unis avec le photographe Walker Evans, ou pour avoir écrit le scénario de "La nuit du chasseur" réalisé par Charles Laughton, on découvre dans "Honorer la fureur" un James Agee tourmenté, un artiste d'une sincérité et d'une humanité bouleversantes dans une Amérique défigurée par la crise de 29.
Ce n'est pas un hasard si James Agee se retrouve en 1936 sur les routes d'Alabama avec un jeune photographe à l'allure aussi soignée que la sienne est négligée. Originaire du Tennessee, état limitrophe à l'Alabama, James a quitté le sud pour Harvard puis New York. Terrifié à l'idée de ne pas avoir d'argent pour y rester, il accepte un boulot de journaliste dans le magazine Fortune, crée en 1930 pour l'un des co-fondateur du Time, Henry Luce. Lors de son entretien d'embauche, James est prévenu : pas de poésie, pas de remous, il est embauché pour écrire dans la ligne, et ses articles seront tronqués s'il dépasse les bornes.

Aussi, quand on lui commande un reportage sur la condition des métayers blancs dans les états du Sud, James laisse avec bonheur les gratte-ciel de New York s'effacer dans la brume. Avec Walker Evans, ils se relaient au volant sur des routes sans fin, écrasées de chaleur, et tentent de rencontrer une famille qui accepterait que Walker les photographie, et que James les interroge. Méfiants, les hommes et les femmes refusent de devenir des sujets de reportage. Jusqu'au jour où, dans une crise existentielle où se mêlent vieux démons et désirs brûlants, James prend la voiture seul et se retrouve coincé près de la ferme des Tingle. Il rencontre alors trois hommes, qui resteront dans l'histoire de la photographie à jamais : Floyd Burroughs, Bud Fields et Frank Tingle. Si Walker immortalise leurs visages qui seront, dans l'imaginaire collectif, ceux de la Grande dépression, James communie avec eux, et avec une empathie exceptionnelle et bouleversante racontera, dénoncera ces vies abîmées par un système qui les broie.
Cette rencontre donnera un projet qui dépassera de loin le simple reportage : Louons maintenant les grands hommes, texte de James Agee, photographies de Walker Evans ainsi que Une saison de coton : trois familles de métayers.

A la suite de cette expérience qui le changera à jamais - parce que c'est celle qui fera de lui un écrivain, James rencontre de grandes difficultés pour se faire publier, n'arrive plus à se conformer à la ligne éditoriale de Fortune, qu'il quitte pour écrire sur son autre passion, le cinéma, au Time. La reconnaissance viendra avec ses critiques, dans lesquelles il cherche la sincérité du réalisateur, une vérité. Son idole est Chaplin, dont il partage la fureur face aux inégalités.

Rodolphe Barry, à qui nous devons de découvrir la vie de cet homme exceptionnel, passionné, amoureux, la liberté chevillée au corps, nous offre avec Honorer la fureur un roman puissant, passionnant, un portrait qui inspire toujours autant aujourd'hui, comme il a inspiré des générations d'auteurs américains. Le roman se termine ainsi, sur un jeune Cormac McCarthy se retrouvant à Knoxville, Tennessee pour écrire Un enfant de dieu.

Alors Rodolphe Barry après un roman sur Raymond Carver et celui-ci sur James Agee, allez-vous nous régaler pour votre prochain projet d'un texte sur l'un des plus grands auteurs américains vivant ?

Un grand merci aux éditions Finitude pour avoir été les passeurs de ce roman qui va nous hanter longtemps.

Pour aller plus loin : réécoutez James Agee ou la voie du réel dans les Nuits de France Culture. 
Retrouvez toutes les publications de et sur James Agee ici.

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