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Je vole

Une actualité de Véronique D.
Publié le 16/03/2016

oiseau en volDeuxième titre de Mathieu Belezi à paraître dans la très belle collection Motifs, Je vole pourrait être considéré comme le  triste reflet d'une société impitoyable. Il serait pourtant dommage de ne voir dans ce splendide roman qu'une thématique dépressive.

Disons-le tout net, l'écriture de  Mathieu Belezi  sublime son sujet. Le sens du détail, de l'image poétique, la force de suggestion émerveille le lecteur qui ne peut dès lors que verser dans l'empathie la plus vive pour ce personnage exclu malgré lui de la société des hommes. A 40 ans, chômeur en fin de droits , dépressif, divorcé, il a pour seule lumière dans son existence  la présence solaire de sa petite fille avec laquelle il déploie ses ailes le dimanche... Jouant à l'oiseau tous les deux, écartant les bras, dévalant les dunes de ce bord de Méditerranée où le soleil semble toujours ne briller que pour les autres, le père et sa fille échappent pour quelques heures à cette société qui contraint, étouffe, lamine, humilie et vole aux hommes ce qu'ils ont de meilleur en eux, leur dignité, leur liberté.

Plus noir qu'Une sorte de dieu qui laissait à son personnage principal une porte de sortie vers une certaine lumière, Je vole est le roman de la chute, celle d'un homme poussé de force vers un choix terrible, celui d'abandonner la partie de ce jeu de dupes qui est devenu pour lui un miroir sans tain. Dérive d'un homme poussé par ses pairs vers un monde dénué de sens et d'intérêt, Je vole est un roman pourtant placé sous le signe su soleil, celui de la Méditerranée. Le soleil ne brillerait-il pas pour tous de la même façon ?

Victimes autant que coupables pourrait-on dire des personnages de Belezi : comme dans Une sorte de dieu, le sentiment d'être une victime consentante et d'être responsable de ce dont on souffre affleure bien souvent. Leur éducation les a domestiqués au point que le sentiment de révolte leur est presque étranger , la désobéissance impossible.

Alors, voler pour "fuir l'ici bas", glisser dans le sillage de sa fillette avec sa robe "en queue d'hirondelle" du haut des dunes, battre des bras pour croire un instant à l'existence de la liberté...et s'envoler pour clore son destin.

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