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Joyce Maynard, de retour du supermarché

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Une actualité de Martine
Publié le 21/09/2013

Joyce MaynardQuinze ans qu'on n'avait eu de nouvelles de Joyce Maynard, terriblement étiquetée par son nouvel éditeur, Philippe Rey, comme "la Françoise Sagan américaine" : cette ex-enfant terrible des lettres américaines (ça a quelque chose de pathétique à 55 ans de s'entendre affubler d'ex-enfant terrible, ce qui semble préparer à future mamie fouettarde) nous revient quinze après la publication de Prête à tout. On oubliera facilement son épisode autobiographique qui lui permit de raconter sa vie avec l'énigmatique J.D.Salinger, ce n'est pas vraiment à sa gloire, pour se concentrer sur son dernier roman traduit, Long week-end. Encore un roman d'ado, pourrions-nous dire, un tantinet fatigués et pourtant celui-ci parvient à distinguer sa voix et à rendre la tension qui l'habite passionnante. Le jeune Henry est à l'acnée... de son existence, coincé entre une mère encore jeune et séduisante mais passablement perturbée par la fatalité qu'elle s'imagine acharnée à la poursuivre et un père qui a pris soin de s'abriter au sein d'une nouvelle famille. C'est l'ennui qui va le pousser à réclamer de sa mère une sortie au centre commercial, c'est le goût de l'inconnu qui lui fait accepter, lorsque sa route croise celle d'un costaud amoché, de le prendre en charge et de le ramener à la maison.Mais ce Monsieur Franck n'est pas un gentil quidam à secourir, il transporte avec lui une lourde histoire, des années de taule et une évasion dont ce week-end semble être la romantique apogée. Car si Franck a un casier, il a aussi la langue bien pendue et un irrépressible besoin de s'épancher et de se justifier. L'amour va naître entre les deux adultes perdus sous le regard de moins en moins compatissant de l'adolescent qui se voit peu à peu écarté de cette double confession ponctuée d'effusions. Les deux jours racontés par le jeune garçon vont nous faire osciller, de façon très américaine (on voit déjà le film...) entre idylle touchante et cauchemar larvé. On sourit aux remarques du garçon qui est tellement proche de sa mère qu'on le suspecte assez vite d'un complexe mythologique, on larmoie aux souvenirs terribles des grands qui ont pris de plein fouet des injustices (les fausses couches de l'une, l'emprisonnement de l'autre), on tremble de sentir que l'épilogue qui se profile va être rude. Mais ça marche, on tourne les pages, captivés. Bien sûr on n'en dira pas plus car Joyce Maynard a un sacré métier et sait nous embarquer au coeur de ce trio terrible et beau. Retour gagnant donc pour cette auteure de grand talent.

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