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L'homme de trop

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Une actualité de Fleur Cattiaux
Publié le 21/09/2013

l_hommedetrop1.pngEntre collection de fragments et recueil de nouvelles, la dernière parution de la jeune maison strasbourgeoise La dernière goutte devrait faire le bonheur des amateurs de curiosités littéraires. L'homme de trop, de Thierry Aué, se présente en effet comme un chapelet de textes classés par ordre croissant de taille et raccordés les uns aux autres par des traits d'union d'ordre lexical ou thématique. Un certain nombre d'éléments récurrents jalonnent le livre tels des leitmotivs - les nuages, le café, l'écriture... - tandis que l'impression d'ensemble qui s'en dégage est celle d'une soif de liberté et d'évasion, inextricablement couplée à un fantasme de table rase qui trouve sa plus belle expression dans le texte intitulé Grand débarras. Mais, loin de verser dans le pathos, ce regard désabusé que portent les personnages sur la vie se manifeste avant tout par une grande distance face au monde, doublée d'une ironie parfois glaçante, dans la veine des nouvelles d'Eric Faye (pour lire notre article sur Quelques nouvelles de l'homme, cliquez ici) ou de Sergi Pamies. Si leur ton varie, oscillant entre l'absurde et le cruel, l'anecdotique et le profond, ces petites histoires sont toujours écrites dans une langue très imagée dont l'élégance, pour sa part, n'est pas sans évoquer la plume de Bernard Quiriny, qui nous avait séduits avec ses Contes carnivores (cf. notre blog), et dont le prochain livre, un roman cette fois-ci, fait partie des livres les plus attendus de la rentrée du Seuil. Quand le plaisir de l'écriture est aussi palpable et indissociable du plaisir de lecture, l'on ne peut qu'encourager ce musicien et photographe reconnu à céder à ce qu'il appelle une "pulsion primitive" et user sans retenue de la troisième corde de son arc !

Si par cas, vous deviez n'en lire qu'une partie, ne faîtes surtout pas l'exception de Grand débarras, Post mortem, Coup de théâtre, Bilirubine, Procrastination, Des années pour écrire un livre lavé et Praxis, que vous pouvez lire dès à présent :

"Incapable de supporter l'idée de vivre une heure, et même une minute de plus cette vie qui pour lui n'avait plus aucun sens, cet homme décida de mettre fin à ses jours, incessamment, mais, comme il n'avait jamais pensé sérieusement à la méthode qui convenait le mieux pour disparaître de manière infaillible, parce qu'il craignait par-dessus tout de se manquer, et de vivre le restant de ses jours avec le sentiment insupportable d'avoir raté, non seulement sa vie, ce à quoi, dans un sens, il s'était peu ou prou habitué, mais son suicide, il prit si bien son temps pour réfléchir à cette question pratique qui, brusquement, était devenue pour lui d'une importance vitale, que l'heure avait passé."

F.A.

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