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La fin des Windsor

Une actualité de Véronique D.
Publié le 19/03/2016

Coup de théâtre au Royaume-Uni ! Les républicains viennent de conquérir le pouvoir et la première décision de Jack Barker est sans appel : la monarchie est abolie et la famille royale sommée de quitter Buckingham. Uchronie ou politique fiction ? La reine et moi  de   Sue Townsend, a dû susciter quelques grincements de dents chez nos voisins anglais. Publié pour la première fois en 1992, avant que la Grande-Bretagne ne vive une crise politique majeure suite au décès tragique de sa princesse adorée, ce désopilant roman est un portrait délicieusement vitriolé d'une famille depuis toujours soumise au feu médiatique, riche et puissante, qui se voit du jour au lendemain contrainte de faire ses bagages (petits) et  de s'installer dans une pouilleuse banlieue de Londres pour y vivre dans "le monde réel, où les gens sont imparfaits, portent des vêtements ternes et parlent une autre langue."

C'est donc au 9, Hellebore Close, (transformé par l'usure des lettres en Hell close), Cité des fleurs, que Mme Elisabeth Windsor, son mari Philip, son fils Charles et sa jeune femme Diana ainsi que les deux enfants du jeune couple s'installent dans deux pavillons murés depuis longtemps à la stupéfaction du voisinage . "Comment s'adressait-on à une personne dont on avait l'habitude de lécher et de coller la tête sur enveloppe ? " Chez les Windsor (mais ne devrait-on pas dire désormais les Mountbatten en vertu des lois du mariage que Philip voudrait bien voir enfin appliquer), les questions sont d'une autre nature : comment faire entrer cet immense canapé, ancienne propriété de Napoléon ou encore les précieux tapis anciens dans de si petits espaces ? La solidarité légendaire du voisinage ne tarde pas à reprendre du poil de la bête et c'est armées de scie, marteau et cutter pour les tapis que les bonnes âmes se manifestent !

Les anecdotes sont  toutes plus hilarantes les unes que les autres et s'enchaînent avec rythme et efficacité pour construire un divertissement plus que joyeux. Au fil des pages, les personnalités se dessinent : si Elizabeth fait face, Philipp s'effondre dans une dépression qui le mènera à l'asile, Charles se met au jardinage bio, Diana, loin de son rôle d'icône, est une jeune femme frivole, égocentrique et matérialiste, leurs deux enfants frayent avec  les graines de délinquants et pratiquent un argot qui ne leur a pas été enseigné par leurs précepteurs, la reine mère s'étiole doucement tandis qu'Ann se révèle être bricoleuse hors pair. Pendant ce temps,au gouvernement, la situation se dégrade, la livre dégringole, les capitaux s'enfuient...

N'y aurait-il point de salut au pays de Dickens sans la monarchie ? La morale semble un peu mince. Pour les français qui ont depuis longtemps résolu le problème en faisant tomber des têtes couronnées ou pas, la question est insolite.  Sue Townsend interroge surtout la santé sociale de son pays à travers la description de la vie dans une cité ouvrière, et fait découvrir à cette candide d'Elizabeth combien il est difficile de gérer un porte-monnaie toujours vide, de compter les sachets de thé ou encore les pences pour prendre le bus... Au final pourtant, qui sera le plus heureux de cette opération ? Harris,  l'un des meilleurs personnages du roman, vous guidera vers un épilogue digne des meilleurs cauchemars...

Une satire percutante et drolatique à rapprocher bien évidemment de La reine des lectrices. Décidément, les familles royales font beaucoup parler d'elles par les temps qui courent...

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