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La vigne d'Holder

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Une actualité de David V.
Publié le 24/08/2013

Eric Holder

Ou aurions-nous dû dire "de Holder" ? Mais soigne-t-on le "e" muet dans le Médoc où l'écrivain du Nord et d'ailleurs semble installé durablement ?  Son prochain livre, dans l'évidente lignée du précédent De loin on dirait une île, sortira en septembre et il nous ramène à cette terre dure et belle dont le nom résonne d'accents enivrés qui oublient cependant l'apreté de la tâche de ceux qui l'ont travaillée. Très touchés par cet essai littéraire que constituait le livre du Dilettante, entre confession et interrogation, nous n'avons pas tardé à nous emparer de Belle ciao (au Seuil) qui nous plonge d'emblée dans les mêmes paysages même si la mention de roman doit nous retenir de trop nous attacher à la dimension autobiographique. La première scène nous installe dans la vision d'un homme au travail après un départ maladroit dans le petit matin. Ce personnage qui entreprend de renouer avec le travail est un hors-la-loi au sens où sa vie n'a pas été rythmée par des horaires, un patron, qu'il a conquis, durement, le droit de vivre à peine de sa plume. Ce travail donc qui n'est pas un job tant il lui réserve de souffrances et de violences faites à son corps et à sa raison va devenir pour lui la planche d'un incertain salut. Et de planches, il en est justement question car il a été engagé par un patron sans pitié, propriétaire d'un futur cru bourgeois qui consacre son existence au labeur, usant ses ouvriers agricoles dans sa fabrique de piquets ou dans ses rangs de vigne qu'il faut soigner mètre par mètre (étonnant personnage d'ailleurs, jusqu'à la scène de rupture). L'épreuve est dangereuse et harassante, et libère chaque soir notre homme dans son marasme quotidien, éloigné de la femme sa vie qui l'a prié de partir car elle ne supporte plus, après plus de vingt ans de pénible cohabitation, ce spectre de l'alccol qui accompagne le père de ses enfants et auquel rien ne résiste. C'est donc seul, dans une maison prêtée par de riches anglais qui surplombe son ancienne demeure que notre homme, même plus capable d'écrire, va traverser son désert intérieur. Il guette à sa fenêtre un signe de sa "bella" d'autant plus aimante qu'elle refuse tout compromis. Livre vrai sans pathos, Bella ciao égraine sa mélodie triste mais ferme, son chant guerrier sans outrance, ses hésitations et ses repentirs avec une modestie pleine de cette assurance que les écrivains sûrs de leur art possèdent. Après, savoir que l'autobiographie s'est immiscée dans tout le roman ne compte guère. Mais il faudra attendre septembre pour vous en faire profiter.

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