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Le vin de Bob

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Une actualité de David V.
Publié le 24/08/2013

Collection EcrivinsPas loin de trois ans que nous n'avions de nouvelles de la déjà fameuse collection "Ecrivins" animée par Philippe Claudel chez Stock, havre de liberté dans un monde où boire, même avec des Lettres, est devenu suspect. Jusqu'à présent il s'agissait de commandes à des auteurs encore actifs de la bouteille - et c'est d'ailleurs aussi le cas avec le livre de Michel Quint paru il y a peu, Les Joyeuses - mais, petite nouveauté qui nous comble, c'est d'un illustre méconnu que nous est offerte aujourd'hui la résurrection d'un texte splendide, Le vin des rues, signé Robert Giraud. Disparu en 1997, il est surtout connu désormais comme un des grands spécialistes de l'argot qui fut la matière de quelques uns de ses livres. Par la grâce et sans doute l'acharnement d'Olivier Bailly, nous le voici rendu, tout entier, dans un bref petit ouvrage, lui aussi à l'enseigne d'Ecrivins, essai biographique admirablement écrit - mais jamais avec cette volonté de faire du Giraud ou d'encanailler trop souvent une langue qui sait se retenir - qui, au fil d'une eau brouillée comme la Seine et tortueuse comme un ruisseau, redonne vie à ce Monsieur Bob, "drôle de passager de la nuit, étranger pourtant partout comme chez lui, solitaire très  entouré", "chat de gouttière, chat errant" qui passe d'un bistrot à l'autre, parfois pauvre comme job, parfois plus sûr de sa bourse grâce à quelques piges bienvenues, ami de ce "légionnaire" (à vous d'en retrouver le sens...) qui vous assomme ou vous rend volubile, oreilles grandes ouvertes pour saisir ces histoires de clochards et de tatoués dont il sera un grand spécialiste devant l'éternel (et l'inventeur de ces fameuses et hilarantes "brèves de comptoir"), camarade insubmersible de Doisneau ou Prévert. Cent quatre-vingt pages taillées dans de l'admiration, de celle qui rend un peu aveugle aux défauts mais jamais sourd aux souvenirs récoltés auprès de ceux qui l'ont connu et aimé, Monsieur Bob est mieux qu'un exercice, plus vivant qu'une nouvelle qui voudrait évoquer ce Paris disparu, un Paris "fragile", comme le dit Philippe Claudel, un monde en train de mourir dont Giraud poursuivait les fantôme, infiniment plus digeste que ces insupportables biographies aussi lourde à porter qu'à mâcher, carrément plus goûteux que ces breuvages fades qu'on nous vend par casiers, c'est un livre qui donne envie d'avoir soif et de l'étancher dans un lieu non conforme aux règles hygiéniques qui nous traquent. Un livre qui donne envie, et c'est son plus beau mérite, de se plonger dans Robert Giraud.

PS : vous pouvez retrouver le blog d'Olivier Bailly à cette adresse : blog

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