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Un diable d'écrivain

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Une actualité de David V.
Publié le 09/05/2013
Jean6luc Coudray Dialogues avec SatanLa tête du sieur Coudray n'est pas de celles qui permettent d'y dissimuler des cornes ; on ne se souvient pas d'avoir remarqué l'aspect pointu de ses oreilles ; et ceux qui peuvent le surprendre au milieu de la nuit en train de galoper (véridique!) dans les rues de la cité endormie ne peuvent pas prétendre qu'il était ceint d'une longue cape. Jean-Luc Coudray est évidemment diabolique, chacun de ses livres nous le confirme, il n'est pourtant pas le diable, en tout cas pas celui que des siècles d'imagerie nous ont transmis. Diabolique parce qu'il n'est guère possible de ne pas rire à ses paradoxes, ses inventions, la vivacité de son intelligence qui s'orne d'une étrange poésie, d'un détachement qui lui évitent d'être inquiétant. Diabolique parce qu'après s'être attaqué à Dieu le Père en malmenant un Monsieur le curé, il nous revient sous forme de fine plaquette, riche d'un Dialogues avec Satan, fruit de ce que l'on suppose une longue fréquentation avec les forces obscures. "Contre-saveur" de Dieu, Prince des Ténèbres, Satan s'en vient visiter régulièrement un écrivain qui ne manque pas de répartie et ne s'en laisse guère conter. Généreux puisqu'il prête volontiers de l'argent, parfois vainqueur dans les joutes qui l'opposent à notre "héros" qu'il sait flatter sans le contraindre, victime d'un viol lorsque Dieu vient lui pardonner, notre pauvre Belzébuth, avachi sur le canapé utilise toutes ses ficelles pour entourlouper notre narrateur mais celui-ci manie le paradoxe avec une telle dextérité que notre puissance maléfique a tôt fait de s'enfoncer dans les coussins.
Il est bien entendu, et comme toujours avec Coudray, impossible de tenter un résumé de ce qu'il nomme curieusement "récit" (à moins qu'une rencontre n'ait eu lieu aux abords du Jardin Public...). On sort ragaillardi de ses fulgurances tranquilles en se prenant à regretter la disparition des soutanes dans les plis desquels, parfois, venait se réfugier ce diable, le même qui aujourd'hui se trouve pris au piège des raisonnements très drôles d'un écrivain que le clergé évite, un écrivain sans corne ni trident, mais pas sans talent.