Le Dilettante a la très bonne idée de publier pour le mois de mai un recueil inédit d'Henri Calet, Huit quartiers de roture. Ecrit en 1949, le texte n'est pas paru à l'époque mais il a fait l'objet d'une adaptation radiophonique trois ans plus tard, en 1952, huit émissions diffusées sur le "Programme parisien" - et dont quelques extraits sont proposés sur un CD en fin d'ouvrage.

En attaquant ce livre, avec toute la curiosité que la découverte d'un ouvrage de Calet peut supposer, on retrouve avec bonheur la verve de l'auteur de Jeunesse.  Sur un ton tantôt poétique, tantôt mélancolique, mais toujours complètement sincère, Calet  nous raconte les XIXe et XXe arrondissements de l'époque, quartiers où il a grandi, où son père a vécu, où son grand père est mort. Muni de deux guides, l'un récent pour l'époque et l'autre bien plus précieux datant de 1867 -un dénommé  "Paris guide", où auraient collaboré pas moins que Hugo, Féval ou encore Sand- Calet arpente avec nous rues et places à la recherche de recoins secrets comme d'anciens souvenirs.

"Il ne me déplaît pas, en marchant, de me perdre un peu, de sortir du temps"

  Entre anecdotes et érudition -l'auteur reprend avec nous toute l'histoire de La Villette ou de Ménilmontant- Calet pousse parfois la chansonnette, nous faisant ainsi réentendre la gouaille de l'époque. Et voilà que nous vient l'envie à notre tour de nous promener dans les quartiers cités munis du livre de Calet, à la recherche du passé, de lieux de notre mémoire, comme pour conjurer le temps...

Les lecteurs du Tout sur le tout -formidable autobiographie de l'auteur qui se lit quant à lui comme un portrait du XIVe arrondissement-  peuvent se réjouir, Huit quartiers de roture vient "boucler la boucle", "looping the loop" -c'est l'obsession de Calet dans Le tout sur le tout- dans le parcours littéraire de Calet et nous permet d'en savoir encore un petit peu plus sur ce romancier si curieux.