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Un repas entre ennemis

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Une actualité de Fleur Cattiaux
Publié le 12/04/2013

Droits Francesca MontovaniIl en va des livres d'Hubert Mingarelli comme de ces petites merveilles auréolées de mystère dans lesquelles on pénètre à tâtons mais qui nous habitent longtemps après que l'on en a terminé la lecture. Lauréat du Prix Médicis en 2003 pour Quatre soldats, ce romancier et nouvelliste continue de nous régaler chaque année avec ses textes poétiques à consonance impressionniste. Avec Un repas en hiver (parution le 22 août aux éditions Stock), il renoue avec le thème de la guerre en mettant en scène trois soldats d'une compagnie allemande face à une succession de dilemmes cornéliens. Après s'être vu annoncer une livraison de Juifs à fusiller le lendemain, horrible corvée à laquelle ils sont bien décidés à se dérober, Emmerich, Bauer et le narrateur obtiennent de leur supérieur la permission de partir à la chasse. Mais que les choses soient claires, il ne s'agit pas de battre la campagne polonaise à la recherche de gibier animal mais bien de débusquer des Juifs et de les ramener dans ce campement militaire de fortune. On imagine le sort qui les attend de toutes les façons. Nous suivons donc ce trio le temps d'une journée alors qu'ils vont braver le froid et la faim (ils sont partis à l'aube sans avoir le temps de déjeuner), conditions qui ne sont pas sans évoquer le célèbre Construire un feu de Jack London. Quelque relative soit leur détermination, ils finissent par en débusquer un qui se terrait dans un trou. Mais pas question de rentrer sans s'être réchauffés préalablement autour d'un feu et sans avoir mangé un morceau. C'est ainsi que ces soldats Allemands s'approprient, le temps d'un repas qui s'impose comme une véritable scène d'anthologie, une "sale petite maison polonaise" de sorte qu'ils finissent par partager leur pitance avec un Polonais et un Juif...

"Les personnages d'Hubert Mingarelli, amis, frères, pères et fils, quels qu'ils soient, toujours s'arrêtent au bord des ruisseaux, marchent le long des rivières et des torrents, naviguent sur les lacs et les océans. Malgré leur blessure secrète, malgré cette douleur sourde, ou cette colère, parfois, tapie au plus profond d'eux, toujours ils avancent la tête haute. Plein de pudeur et de sollicitude, ils parlent peu, mais ils parlent juste. Ils savent s'écouter et se comprendre. Ils savent se réconforter en construisant des feux. Les personnages d'Hubert Mingarelli, par-dessus tout, essaient d'être à la hauteur. A hauteur d'ami, hauteur de père, hauteur de fils ou de frère. En résumé, à hauteur d'homme. Quoi de plus difficile ? C'est peut-être pourquoi, souvent, ils sont inquiets, car ils savent que la tâche est immense et que le temps est compté." Voilà ce que son ami et écrivain Joël Egloff a écrit sur lui dans la préface de La source. Si vous ne connaissez pas encore l’œuvre d'Hubert Mingarelli, il est grand temps de la découvrir et de vous laisser habiter par ses textes intemporels et inoubliables qui parviennent à retranscrire en une poignée de mots la douleur et les combats intérieurs les plus prégnants.

F.A.

 

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