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Un silence de plomb

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Une actualité de Fleur Cattiaux
Publié le 27/12/2014

9782283026946Paris, années 1980. Victor, le narrateur d'Un hiver à Paris, le nouveau roman de Jean-Philippe Blondel (éd. Buchet-Chastel), fait partie des déracinés. Originaire d'une famille modeste d'une ville de province jamais citée, il est arrivé à Paris pour intégrer une classe préparatoire littéraire de renom, sans rien avoir d'un Rastignac. Entre la compétition qui règne dans sa classe, l'éloignement de sa chambre d'étudiant à Nanterre, et l'anonymat des transports quotidiens en RER, il se voit confronté à une grande solitude pendant toute la première année. Il comprend bien vite qu'en dehors de tous les savoirs qu'il pourrait apprendre dans ses livres, cet univers fonctionne selon des codes qu'il ne peut guère se targuer de maîtriser. Il est donc exclu. Les choses sont enfin en passe de changer lorsqu'il sympathise la deuxième année avec un élève d'hypokhâgne, Mathieu Lestaing. Difficile de parler véritablement d'amitié pour désigner les conversations qu'entretiennent les deux garçons à la faveur de quelques pauses cigarettes, mais c'est au moins un début. Victor envisage même de l'inviter d'ici quelques jours à partager cet anniversaire qu'il passerait seul autrement. Mais voilà qu'un événement tragique coupe court à ses projets et a pour étrange conséquence de secouer l'ordre social établi jusque-là, le tout dans un nuage de silence.

Au delà de l'exploration d'un microcosme très particulier – la pression et la compétition auxquelles sont soumis ces élèves que leurs professeurs appellent bien souvent « l'élite de la nation », ce qui ne les dispense pas de les traiter parfois avec un grand mépris – Un hiver à Paris est une radiographie des relations familiales, des convenances, des barrières sociales et de la perte.

« C'est le propre du roman d'amener le lecteur à renoncer au sommeil. A se relever, sans faire de bruit, pour ne pas troubler celui ou celle qui dort à son côté. A descendre dans le salon, allumer les lumières et s'affaler dans le canapé, vaincu. La prose a gagné le combat. On ne peut plus lui resister. Ce serait mon ambition désormais. Je voulais accompagner l'insomnie de autres. J'écrirais des romans.»

Quelle que ce soit la dimension autobiographique de ce roman, il faut bien reconnaître que l'auteur a réussi son pari : Un hiver à Paris est un livre obsédant que le lecteur a du mal à reposer, tandis qu'il se laisse peu à peu hanter par cette galerie de personnages en quête de soi, en quête de sens, dont la partition est orchestrée avec délicatesse et retenue.

F.A.

N.B. : Interview vidéo de l'auteur à suivre sur www.mollat.com et sur YouTube. 

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