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Crime et châtiment de Fédor Dostoïevski, par Thibaud Martin

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Une actualité de Adeline
Publié le 21/05/2013
Un monstre de la littérature russe et mondiale. Dostoïevski nous amène à nous glisser le temps d’un livre dans la peau d’un jeune étudiant sans le sou qui va céder à ses pulsions et se livrer à un des actes les plus vils de la nature humaine : le meurtre. La plongée dans les méandres du cerveau torturé de notre jeune étudiant paumé est fascinante. Et prenante. Car Dostoïevski adopte le point de vue de l’assassin. Et ça change tout. La scène du meurtre est impressionnante de réalisme. On est pris, envoûté, emporté par le flot, la tension, l’excitation l’impulsion qui porte Raskolnikov. On est saisi d’effroi, on est à la place de l’assassin en puissance. Ses hésitations, ses pensées, ses doutes sont nôtres. On est l’assassin. On s’interroge : vais-je y arriver ? Vais-je avoir le courage, la folie, l’impulsion nécessaire ? Vais-je m’en sortir ? On tremble lorsque le plan ne se déroule pas comme prévu. On retient son souffle et on reste silencieux lorsqu’on est recherché. On souffle quand on parvient à s’échapper. Mais le répit ne dure pas. La folie gagne. On est rattrapé par la peur de la dénonciation, l’angoisse que la police nous retrouve. On se cache. On se terre. Mais le plus grand danger ne vient pas de l’extérieur. Il est là, à l’intérieur. Il est en nous. On subit alors avec le héros sa descente en enfer. On se perd à moitié délirant dans Saint Pétersbourg, se laissant guider par notre inconscient. On se rebelle contre cette société qui nous est hostile, inhospitalière, incarnée par la vieille usurière. On remet en cause le 5ème commandement : « tu ne tueras point ». Mais si l’on tue un être abject, néfaste, inutile ? N’a-t-on pas le droit de tuer ? Les grands hommes n’ont-ils, ne doivent-ils pas tuer pour devenir ce qu’ils sont ? Ne suis-je pas un grand homme ? Puis, las, à bout de force, on cherche à mettre fin à cette souffrance, on cherche de l’aide, mais personne ne peut nous sauver, car on ne veut pas l’être. Alors, on fait la seule chose possible : on se résigne, on se soumet, tel Platon buvant la cigüe, à la loi de notre pays, même si on la trouve injuste. On subit le châtiment. Pour nous même. Pour être libéré. Pour ne plus souffrir. Pour repartir à zéro. Ses aspirations et ses peurs sont un peu les nôtres, le désir de grandeur, le sentiment d’être supérieur et de ne pas devoir être assujetti aux lois. Et son refus d’une vie tranquille, paisible, du conformisme social et de la rationalité, par sa déchéance qu’il provoque lui-même, et qui est ici poussée à son paroxysme, se retrouve dans la jeunesse d’aujourd’hui, comme d’hier. Seul son remords dénote et paraît parfois faux, trop grand, trop fort, trop imposant. Mais peut-être est-ce dû à la surabondance de séries policières qui encombre nos écrans et nous rend de moins en moins sensible au meurtre. Crime et châtiment nous rappelle les différentes phases par lesquelles passent le meurtrier et qui sont souvent négligées. Il est donc conseillé à tous les assassins en puissance…