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L’Arrière-Saison de Philippe Besson, par Justine Bailly

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Une actualité de Adeline
Publié le 21/05/2013
J’ai découvert Edward HOPPER lors de l’exposition organisée à Paris, fin 2012. Je suis tombée sous le charme de ces peintures qui suggèrent et laissent le spectateur libre de s’inventer une histoire. Mais quelle histoire ? Philippe BESSON, dans L’arrière-saison, nous propose une histoire, inspirée de la peinture Nightawks de HOPPER. Une femme flamboyante dans sa robe rouge est accoudée au comptoir du bar Phillies en présence d’un homme en costume et chapeau gris. Derrière le bar s’affaire le serveur, tout de blanc vêtu. Le tableau, tout en sobriété, mêle ombres et lumières. Il met en scène ce bar, seule âme vivante de la ville. L’instant est figé et le spectateur pressent les liens étroits tissés entre les personnages. Mais quels sont ces liens ? Philippe BESSON nous peint ces destins croisés dans son roman : leur passé, leur présent et suggère leur futur. Louise attend son conjoint Norman, un Martini blanc à la main. Cette jeune femme rayonnante parait sûre d’elle. Jusqu’à ce que Stephen, disparu de sa vie depuis 5 ans, resurgisse brusquement dans ce bar. Le silence est lourd et le malaise palpable. Ben, le serveur, se fait médiateur, comme une bouée à laquelle les deux personnages se rattachent dans l’océan agité. Puis il s’efface, laissant aux deux anciens amants le loisir de se réapprendre. Et nous, lecteur, nous arrivons au cœur de leurs vies. Nous sommes comme en apesanteur au dessus de ce tableau. Nous assistons en témoin muet et invisible à une sorte de danse qui les rapproche doucement. Tout se déroule de façon si fluide et évidente. Mais chaque mot est chargé d’émotions. Entre révélations, reproches, et récits de vie, les personnages se dénudent sans jamais se livrer tout à fait. Et nous avons pourtant le sentiment de parfaitement les connaître. De pouvoir prévoir leurs mouvements, leurs intentions. Nous aimerions pouvoir les aider à se réapprivoiser. Mais nous ne pouvons brusquer les choses. Il faudra du temps. Cette notion de temps est également au cœur du roman. Du temps pour oublier, du temps pour se reconstruire, mais selon Louise « on ne refait pas sa vie, on la continue en ne déviant pas de ce à quoi on croit et en apprenant de ce qu’on traverse. » Le temps est imprévisible, la vie est imprévisible. Le roman s’achève d’ailleurs sur ce mot. Mais ce qui compte, ce sont ces retrouvailles, dans ce bar. « L’important c’est l’instant, sa fragilité et son intensité ».