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Paris est une fête, d'Ernest Hemingway

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Une actualité de Adeline
Publié le 20/04/2016
A mi-chemin entre le roman et l’autobiographie, Paris est une fête est une collection de vignettes parisiennes, écrites par un Hemingway sur le point de mettre fin à ses jours à partir des vestiges de son premier séjour à Paris. Il travaillera sur ce livre jusqu’à sa mort, sans lui donner de conclusion ni de titre. Et pourtant, même inachevé, Paris est une fête réussit à transporter le lecteur dans le Paris de l’époque, le Paris des années folles, formidable lieu de rencontres où se croisaient artistes, écrivains et intellectuels. Paris est une fête, c’est d’abord un hommage à la Ville Lumière, un hommage qu’Hemingway rend à la ville qui l’a toujours inspiré (« Paris valait toujours le déplacement, et on recevait toujours quelque chose en retour de ce qu’on lui donnait » conclue-t-il). Mais c’est aussi un hommage à la vie, à sa vie avec Hadley, sa première femme, une vie de bohème mais simple et heureuse. Chaque vignette constitue une fenêtre ouverte sur la vie à Paris dans les années 20, à travers une anecdote humoristique, grave ou parfois introspective. On y croise des personnages hauts en couleur, de l’impétueuse Miss Stein au lunatique Francis Scott Fitzgerald, en passant par le répugnant Ford Madox Ford ou encore Ezra Pound, l’ami dévoué. Hemingway prend plaisir à transposer anecdotes et traits de caractères dans une « œuvre d’imagination » plus ancrée dans le réel que ce qu’il n’a jamais écrit. Tous ces personnages qui l’ont marqué renaissent sous sa plume, prennent corps dans l’esprit du lecteur et lui font découvrir, chacun à sa manière, le Paris des années 20. Plus proche du lecteur que jamais, Hemingway nous livre des anecdotes intimes – du pacte secret passé avec Hadley pour laisser pousser leurs cheveux à la même longueur, jusqu’à sa passion pour les courses de chevaux – et nous parle directement en même temps qu’il se parle à lui-même. Le Paris d’Hemingway, c’est aussi des lieux : des allers-retours entre Paris et Schruns où les hivers étaient plus doux, des après-midis entiers à écrire à la Closerie des Lilas, des rencontres à la fameuse librairie de Sylvia Beach – ; c’est aussi des sensations – l’ivresse du pari, le goût du café crème lors des froides matinées d’hiver, le plaisir des interminables discussions littéraires avec Miss Stein, Evan Shipman ou Ezra Pound… Avec Paris est une fête, Hemingway lègue à ses lecteurs son dernier cadeau. En n’apportant pas de conclusion au livre, il nous laisse finalement carte blanche, pour tirer nos propres leçons de ces anecdotes qui, comme il le rappelle, oublient forcément des pans entiers de sa vie de l’époque et en modifient d’autres. « Toute réminiscence du passé met forcément en jeu l’imagination », se justifie-t-il, et après tout, est-ce important que les faits rapportés aient été réels ou non ? Ce qui compte, finalement, c’est l’éclairage qu’il apporte sur le passé, les relations humaines, et la vie. Claire Feuardant