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Terres des oublis de Duong Thu Huong

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Une actualité de Adeline
Publié le 04/06/2014
Un flot nous emporte vers les chaleurs et les aspérités du Vietnam. Ce Vietnam renaît des cendres de la terre brûlée par le soleil et des séquelles laissées par les bombes de Napalm. La renaissance de ce monde lui autorise l’idéalisme qui se traduit sous les doigts de la romancière par l’histoire d’amour symbiotique entre Miên et Hoan. Mais de la pluie de cendres émerge un autre amour, bien plus sale, noueux et tenace, indestructible et mortifère car seul lien d’un Homme avec la vie. Cet amour est celui qui porte Bôn, premier mari oublié de Miên. Il revient en demandant sa femme après 14 années d’errance. Il a circulé dans un enfer peuplé des fantômes de ses camarades, ayant la lune comme unique compagne et guide vers son ancien foyer. Mais les relents de l’haleine souffreteuse de Bon sont comme les relents de la guerre du Vietnam : rien ne peut être reconstruit provenant de ces émanations. Alors il faut la culture, l’innocence et les principes. Nourri des anciennes valeurs mais épargné par l’Histoire, seul Hoan semble être capable de créer, d’innover, d’engendrer de la richesse. Est-ce en cela que le Vietnam s’est transformé en Terre des oublis ? Les Hommes voulant bâtir leur vie semblent devoir oublier les années de guerre. Marchand extraordinairement doué, Hoan est pourtant trop respectueux envers les hommes et la terre pour être une émanation du capitalisme. Sa richesse vient du fait que la guerre l’a épargné, physiquement bien sûr, mais surtout moralement. Il n’a pas eu à oublier puisque les atteintes portées à son pays ne l’ont pas directement touché. Duong Thu Huong est une écrivaine mais surtout une dissidente politique. Est-ce un cri demandant au Vietnam l’oubli des années d’horreur afin de permettre l’avancée et le progrès? Ce roman nous compte l’histoire d’un triangle amoureux dans un univers fait de riz gluant, de friandises sucrées, de médisances, de jungle, de beauté et de rouerie. C’est un livre d’odorat et de goût, de vision et d’ouïe. Mais l’usage de nos cinq sens nous emmène vers l’exotisme et l’étrangeté d’un pays peu connu, fait de bois, de tradition et d’histoire politique. Un livre pour la tête, pour le cœur, et pour le corps en somme. Nolwenn LE JAN