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Yellow birds de Kevin Powers

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Une actualité de Adeline
Publié le 04/06/2014
« La guerre essaya de nous tuer durant le printemps ». C’est sur cette personnification du conflit irakien que s’ouvre le premier roman de Kevin Power, Yellow Birds. Elle nous promet qu’on saura tout d’elle comme on peut connaître un homme. Livrée tel un reportage, elle nous apparaît toutefois seulement en toile de fond de l’amitié progressive de deux hommes. L’histoire est simple, comme nous le laisse entendre la quatrième de couverture. Deux jeunes soldats engagés en Irak vont peu à peu se lier d’amitié, Bartle en sortira vivant, Murph, non. Pourtant, même si on connaît déjà la fin, on ne repose pas le livre sur sa table de chevet. On continue, au contraire, de tourner les pages, les unes après les autres. On prend le temps de saisir chaque mot car Kevin Powers nous livre là un roman réaliste, fort de son expérience personnelle, mais toutefois poétique par moments. Les descriptions sont détaillées, au point qu’on connaît la couleur des feuilles dans les arbres ou les conséquences, physiques, d’un mortier qui tombe sur le sol. Kevin Powers ne lésine pas sur les détails, l’important n’est pas de plaire mais de rendre la situation la plus réaliste possible. Mais ce qui fait réellement la particularité du roman est le sentiment décortiqué de culpabilité que Bartle ressent envers son ami Murph mais également envers le camp ennemi, qui n’est pas si différent de lui. Le statut du soldat, héros rentré au pays, est remis en question pour celui de meurtrier. Grâce aux allers retours constants entre l’Irak et la Virginie, l’auteur nous plonge dans les pensées du personnage, partagé entre ses souvenirs en Irak et son statut de vétéran. Le fait qu’on soit conscient que le personnage connaît la fin dès le début du livre fait la force du récit. On ne nous raconte pas des flashbacks mais des moments présents, comme si le personnage y était encore, qu’il n’avait pas vécu la suite de l’histoire, tout en ayant pourtant en tête les conséquences des événements. On comprend alors que la guerre habite le soldat en tous lieux, même quand elle n’est plus là. On l’accompagne tout en ressentant un certain silence caractérisé par l’absence presque totale de dialogues et qui témoigne du peu d’humanité de cette guerre. La mort est banalisée. Au début, il y a bien un décompte qui finit par disparaître, lui aussi. Il n’y a plus de bien ou de mal, il ne reste plus que la survie du soldat qui compte. Mais cette survie n’est-elle pas que physique, l’esprit resté aux combats ? Manon Marc