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L’amie prodigieuse

kedgejettelencre2020
Publié le 17/06/2020
L’amie prodigieuse, Tome 1 à 4, d’Elena Ferrante
Elena et Lila sont deux petites filles issues d’un quartier populaire de Naples au début des années 1950. Toutes deux sont douées à l’école, mais une seule aura la possibilité poursuivre ses études…

L’amie prodigieuse est un univers à part.
Tout s’y retrouve : problèmes de classe sociale, relations familiales compliquées, paradoxes d’une amitié entre deux filles différentes, volonté de s’extirper d’un milieu toxique pour briller ailleurs… Elena et Lila sont deux personnages que l’on a l’impression de tenir par la main tant leurs caractères sont développés avec réalisme, intelligence et sensibilité. On grandit avec elles et on vit pleinement chaque évènement marquant à travers leurs yeux par des descriptions poignantes d’atmosphères, de dialogues, de non-dits. Trahisons, manipulations, retournements de situation, ellipses mystérieuses, tout se prête aussi à une intrigue bien ficelée qu’on ne peut plus lâcher une fois entamée. Elena Ferrante tisse une toile de personnages inter-reliés qui ont chacun une influence dans l’histoire, à la manière de l’écrivaine, souvent implicite. Le lecteur doit analyser lui-même la société qui lui est présentée et peut s’approprier les personnages comme bon lui semble, avant que les dénouements ne lui projettent la vérité au visage. Un puzzle de conflits d’intérêts se mêle à des relations amoureuses passionnées qui semblent vouées à la tragédie. On retient son souffle, on s’indigne, on a pitié, on déteste, on compatit, on s’implique. On a affaire à un Gossip Girl des années 50, où les privilèges sont absents et où il faut les conquérir avec persévérance et sacrifice. L’ascension se fait d’une manière propre aux deux héroïnes, ainsi que la chute qui suit inlassablement. En arrière-plan, Naples, société changeante grouillant de corruption et de secrets, offre un décor historique aussi contrasté et passionné que ses personnages. Une ambiance torturée ou aucun tabou n’est épargné ; la violence qui se dégage des lignes ne se situe pas dans la description d’actes violents, mais bien dans la perception et la souffrance si bien retranscrites des personnages. On a le cœur serré à tour de rôle pour chaque protagoniste au fil du roman. Un personnage que l’on déteste finit par nous toucher et devenir notre petit protégé quelques pages plus tard. Le destin se mêle aussi à l’histoire, on sent implacablement la catastrophe venir mais on garde espoir. Un final digne d’une tragédie grecque sur lequel on ne peut s’empêcher de penser « je le sentais venir. »

Bibliographie