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Le désespoir des singes … et autres bagatelles

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Le désespoir des singes … et autres bagatelles - Françoise Hardy
Publié le 05/04/2017
Découvrez les chroniques des participants au concours Kedge Jette l'encre - édition 2017

"Ce qu'il faut de malheurs pour la moindre chanson ; Ce qu'il faut de regrets pour payer un frisson ; Ce qu'il faut de sanglots pour un air de guitare". C'est sur ces vers d'Aragon, repris par une artiste yé-yé des années 1960 que débute ma chronique. Je parle bien sûr de Françoise Hardy. Ces vers prennent tout leur sens lorsque l’on s’intéresse à son autobiographie. Jeune fille tourmentée par un passé douloureux, elle devient finalement le symbole d’une génération. Mais sous ses airs de pop-model, elle demeure cette femme timide et secrète, ayant très vite abandonné la scène. Aussi, qui aurait cru que sous cette frange se cachait une si belle plume ?

 

   

Parolière, on la savait ; écrivain, on ne peut moins. Et pourtant, dans ce qui s’apparente à un journal intime, Françoise Hardy nous transporte dans un tout autre monde, un monde qui était sien. Aveu touchant d'un passé qui ne peut être oublié, l'artiste s'amuse à exploiter son autobiographie sous toutes les formes. Le livre n'est plus seulement une simple expérimentation du toucher, il s'écoute et se regarde au fil de multiples annotations qui multiplient nos émotions. De Mick Jagger à Dalí, cet ouvrage recèle de références picturales, filmographiques mais surtout musicales, ayant marqué la fin du siècle dernier.

 

   

Ce livre comporte également une toute autre portée. Dans ses mémoires, Françoise Hardy évoque à bâton rompu les thèmes tabous de notre société : euthanasie, infidélité, mort… Ces maux lui semblent familiers puisqu’ils ressassent chacun une période douloureuse de son passé.

 

 

Hymne à la souffrance, ce livre nous donne une esquisse de l’âme de son biographe. A travers cette épopée mouvementée, Françoise Hardy nous expose son ennui baudelairien. Victime d’une grand-mère oppressante, d’une mère trop possessive, d’un amour spinoziste inassouvi ; mais surtout, victime d’elle-même. C’est en effet avec un malin plaisir qu’Hardy s’auto-dénigre ; remettant sans cesse en cause son talent d’artiste et critiquant fervemment son caractère.

 

 

Finalement, ce livre sonne pour moi comme l’une de ses si belles chansons, Traüme. Traduit de l’allemand : « Les rêves qui ne sont rien pour nous ; A temps devraient être vus autrement ; Car ils guident nos pensées ; Sur le chemin que nous emprunterons alors ». Dans la pudeur et la légèreté, l’artiste nous fait partager un rêve qui était sien. Véritable purgatoire, cette autobiographie nous permet d’entrevoir la profondeur de son âme.