On ne présente plus Richard Matheson, journaliste et auteur de science-fiction incontournable, il est à l’origine d’œuvres majeures du genre telles que « Je suis une légende » ou « L’homme qui rétrécit ». Dans ce récit de 1975, Matheson fait le pari audacieux de mêler science-fiction, fantastique et roman d’amour, ce qui est particulièrement rare.
Cependant et comme toujours, Matheson nous emporte dans son monde hallucinant et presque « cinématographique » tant la qualité de ses descriptions permet au lecteur de se projeter dans l’histoire.

Condamné par une tumeur au cerveau, Richard Collier, trente-six ans seulement, sait qu’il va mourir. Il ne lui reste que quelques mois, peut-être quelques semaines à vivre, il décide alors de tout quitter et se lance au hasard vers la Californie. Il veut profiter de ses derniers instants pour méditer sur sa vie, qui lui semble parsemée d’échecs, il n’a jamais réussi sa carrière comme il l’aurait voulu et surtout, il n’a jamais rencontré le grand amour. Ces constats sont encore plus douloureux alors qu’il sait qu’il n’a plus le temps de changer les choses.
Il décide alors de s’arrêter dans un hôtel de la côte au charme suranné et tombe sur la photo d’une actrice, Elise McKenna, dont il tombe fou amoureux. Le problème c’est qu’elle a séjournée à l’hôtel en 1896, soit presque un siècle plus tôt. Cela ne suffit pas à arrêter Richard qui veut à tout prix la rencontrer, quitte à briser les lois du temps, de la vie et de la mort.

En lisant ce roman, on retrouve l’écriture et le soin de la forme propre à Richard Matheson. Le Jeune Homme, La Mort et Le Temps est présenté comme le manuscrit de Richard Collier, publié à titre posthume par son frère qui est persuadé que ce récit est le fruit des hallucinations de Richard, provoquées par la maladie. Au début le texte n’est qu’un journal de bord, écrit de façon concise par un Richard stressé et encore coincé dans sa vie d’avant, mais au fur et à mesure l’écriture évolue au gré des sentiments du narrateur, elle devient plus douce et calme, avant d’atteindre son apogée à sa rencontre avec Elise.
Cette façon d’écrire plonge le lecteur dans cette atmosphère hors du temps, et on se sent lié au destin de ces deux amoureux impossibles, tout en sentant que tout est fragile, éphémère, les évocations de la maladie de Richard étant autant de rappels douloureux à la réalité.

Ainsi nous découvrons un des plus beaux récits d’amour que l’on ait écrit, le Roméo et Juliette de la science-fiction, mêlé à une approche du voyage dans le temps novatrice, loin des machineries de H.G. Wells. Ici ce sont la pensée et la volonté qui sont les moteurs, rendant le voyage presque accessible au lecteur.
Définitivement un roman magnifique, une fiction qui entre nos mains devient réelle et qui une fois commencée ne peut plus être lâchée avant d’avoir tourné la dernière page, le cœur battant.